Adieu au siècle
Héritier d’un siècle épuisé
Je livre ici quelques images
Qui me pèseront sur le cœur
Pour le millénaire à venir
J’ai vu tout près de Bethléem
De très jeunes Palestiniens
se battre à coups de lance-pierres
contre les fusils des soldats
Sur les trottoirs de Calcutta
J’ai croisé des enfants sans mains
Qui mendient par le seul regard
Ils n’ont ni maison ni parents
Au Cambodge, en Afghanistan
Encore et toujours des enfants
Au pied broyé sur une mine
Laissée par des soldats enfuis
En Afrique ils meurent de faim
En Algérie on les égorge
Partout ils sont martyrisés
Les enfants de notre planète
Dans les bas-quartiers de Rio
Le monde est pour chaque habitant
Peur, saleté, misère et boue
Voir cela est désespérant
Faut-il toujours aller si loin
Chercher d’aussi tristes spectacles ?
À Paris, Bruxelles ou Saint-Ouen
J’assiste à la même débâcle
Je n’aime pas beaucoup l’odeur
Du siècle moisi dont j’hérite
Il sent la mort et la terreur
Il est trop lent ou va trop vite
Enfant des années à venir
Essaye d’être un peu plus sage
Que nous ne l’étions avant toi
Oublie la colère et la rage
Avec tous les ordinateurs
Et leurs écrans bleus de contrôle
Peut-être dénicheras-tu
Des réponses à ces questions-là :
Pourquoi tant de sauvagerie
Dans un monde aussi policé ?
Pourquoi ces misères criantes
Dans un monde aussi équipé ?
Héritier d’un siècle cruel
Je vous lègue, enfants, mes révoltes :
De simples mots sur du papier
Mais ils sont ma seule récolte.